MARC-HENRI ARFEUX
OEUVRES LITTERAIRES, PICTURALES, MUSICALES, PHOTOGRAPHIQUES
Poèmes Inédits 2016
In Memoriam Else Marie Pade
(compositrice danoise décédée le 18 Janvier 2016)
I
Nommer l'étoile émue selon son aube.
La perle du silence, esprit de fluidité,
Regarde à l'horizon.
Elle offre solitude et sa maison lueur
Au nu visage du premier seuil.
Fraîcheur de son appel dans le verger de la distance,
Tandis que pure est cette aura cerclée d'attente
Au bleu mystère de son oiseau.
Mercredi 20 Janvier, 2016, 16h08
II
Lointain lever de nombre blanc
Sur l'axe du silence,
Anneau d'épouse au doigt stellaire.
Cristal,
Jardin de sphère,
Lever de goutte ouvrant les étamines,
Les filaments de ce grand gel auréolé.
Chemin venant, à l'imprévu de tout chemin
Formé d'absence et de fumée
Dans le regard du premier jour ;
Et l'arc, en un seul point,
Constellation instantanée
Au cerisier de la naissance.
Mercredi 20 Janvier 2016, 18h48
Pour Marie-Ange Sebasti
La nuit éclot.
Parfum de l'invisible pur
A l'arbre silencieux.
Bougie de neige,
Vivante et nue comme un visage
Que la fraîcheur d'une eau
Délivre de l'oubli.
L'oiseau de solitude attend l'étoile
Qui saluera le vide
Vendredi 5 Février 2015, 13h30
La nuit roucoule en ses lilas d'étoiles,
Et son feuillage est maison nue.
Les portes s'ouvrent,
Vin noir dans le lointain des lampes.
Dimanche 13 Mars 2016, 18h36
Elégie nue pour un oiseau
La nuit redit le nom de tes visages,
Et le chemin transporte sa lueur
Dans le lointain du temps
Qui tremble de forêts.
Il ne reste qu'un fil au plus désert du vent
Pour écouter l'absence
Former le nombre d'un rosier,
Jardin pour un peut-être.
Mercredi 23 Mars 2016, 22h28
Pour Caroline Dahyot
Tombeau du corps poupée
Dans le dédale éblouissant d'oubli,
Viscères de neige,
Les hautes poupées chantonnent à fil perdu.
Maternités qui se dispersent
Au long du noir plancher gravé de tant d'hivers.
Venir à ce regard de goutte, par le sang du silence,
A travers tous les cris, les masques
Et les ciselures de la poussière,
Vrai coeur aux longues fougères
Fardées de leurs aiguilles.
La nuit pubis, maculée de pétales qui sont aussi
Des mufles rouges, sang des rosées, orages épanouis
Sur des ronciers,
Et galaxie du parfait noir terrible et pur où le vide est lui-même
Un inverse en exil,
Ce déchirant pubis aux toisons saccagées ;
Puis adorablement, le lait coulé de cette enfance qui se défait
Selon la bouche tachée d'oiseaux –
Comme les mots sont béants quand ils se figent
En nuits de roses formant des puits sans fin !
L'adieu est sa naissance, poupée nue aux outrages,
Pour être fruit, dans le verger de solitude.
Lointaine alors, enfance cousue de fleur brûlée,
Veillant la pulsation des ailes qui continuent d'ouvrir le jour
Sous une épingle.
Samedi 21 Mai 2016, 15h01
Pour Yves Calvet
Le Secret
Les bêtes s'affrontaient, bien sûr,
Et comme ce fut toujours, la nuit les exaltait,
Les poussant au combat
Selon ses lois obscures à peine tachées
De lune et de poussière d'étoiles.
Ce n'étaient que grands cris, furieux appels,
Craquements et bris contre la roche.
Mais dans le nu désert ouvert au vent des heures,
Un chant d'étrange et d'inconnu
Rappelait avant l'aube
Qu'il est un pur secret dont la goutte est fraîcheur
Au front des solitudes.
Vendredi 24 Juin 2016, 11h20
Pour Marie-Ange Sebasti
Pourquoi la rose et le blé mûr
Contre la joue de l'heure ?
Pourquoi le vin de l'horizon
Attirant l'oeil et son jardin
Dans le galop de ses vents purs
Ouvrant fenêtres
Et longs déserts échevelés ?
Pourquoi l'appel
D'un simple instant de la lumière
Si proche,
Comme un oiseau,
Dans l'arbre de toujours ?
Dimanche 26 Juin 2016, 18h04
Azur, dit le matin à son feuillage,
Tes doigts, plongeant sous la lumière,
En retirent un pétale, instant de cerisier
Ouvrant chemins selon la transparence.
Le bleu voyage avec le chant,
Et sa présence est un blason,
Sourire de monde,
Maison des heures épanouies,
Comme ce jardin où, lentement,
Tes pas rencontrent les parfums
Qui naissent au bord des lampes.
Jeudi 30 Juin 2016, 9h11
In memoriam Yves Bonnefoy
A l'inverse du leurre
S'ouvre le seuil aux lumières longues
Et lents chemins.
Toujours est cette oblique après-midi
Où le doigté de l'ombre est traversé d'aura
Pour les rosiers, les herbes et le silence.
Seul un oiseau attend l'instant de son étoile.
Samedi 2 Juillet 2016, 10h18
Variation sur un vers d'Yves Bonnefoy, extrait du "Lieu des morts"
Sont-ils l'esprit des feuillages ou des feuillages plus hauts ?
Ceux qui sont seuls par tant de souffles unis,
Jusqu'au plus mince des peupliers,
La pointe sensible d'un feu pâle,
Naissant d'inverse vent sans cesse aux miroitements,
Fragiles, pensifs comme est la lune en fin d'après-midi
Quand son absence est buée ronde au seuil
Décoloré d'arrière azur ;
Sont-ils ces lents chemins de fumée nue qui se promènent
Entre les herbes sèches, le tremblement de l'air
Et le sommet de l'heure ?
Ou dans ces grandes agitations de feuilles
Aux branches que soudainement le vent du soir
Passionne,
Ou le jet nu de la fontaine poussé sur l'air,
Cet appentis fermé où les outils sommeillent,
Selon la blanche odeur du sable et des reflets,
L'oscillation perpétuelle du jour tardif
Au sein des arbres mûrs,
Avec la lampe que l'on ne voit, et le silence
Traîné à terre, les libellules buvant le lait
Sous la statue d'un sans visage
Que les fourmis habillent,
Tandis que la splendeur du temps.
Samedi 2 Juillet 2016, 16h11
In memoriam Yves Bonnefoy
La nuit ne viendra pas
Tant que les arbres et la fontaine
Seront un chant pour la lumière.
Les marbres habités resteront lieu
D'un long regard,
Et les lauriers continueront
D'écussonner l'azur.
Que les parfums retiennent encore
Le sable des mains tièdes,
En écoutant
La voix,
Tranquille et seule
Dans les feuillages
Samedi 2 Juillet 2016, 23h41
Maisons du mauve devant le rien.
Le champ de neige fleurit.
Voici que la fumée ouvre un chemin dans l'indécis
Cherchant au fond du jour cette illumination de long brouillard,
Avec l'attente, écho de son silence, et l'immobile amour
Qui retient l'heure au bord du vide,
Naissant pays de transparence, et le pressentiment
De la terre pure en forme de sourire.
Jeudi 13 Octobre 2016, 19h43
Le pas de l'aube est le chemin
Où le regard suit la fumée,
Naissant d'une rive à l'autre du silence ;
Autour est la forêt d'un noir de lampe,
Avec les yeux.
Lundi 17 octobre 2016, 23h19
La nuit, la neige se relevait dans son sommeil
Pour observer la lampe
Qui de très loin prophétisait
Sa vérité de premier songe.
Elle écoutait l'ailleurs au pli de son vallon
Où les lisières, frappées de givre et de silence
Comme les monnaies du jeu mental,
Ouvraient sentier de solitude à celle qui attendait.
Toujours, le haut jardin de son exil,
Portait les grains de la mémoire
En rouge et or dans son reflet de brume
Et de disparition crépusculaire.
Alors la Dame, tenant visage au bord du vide,
Appelait un renard au chevet de ses larmes,
Enfin recommencée par l'écheveau du sang
Et la beauté brisée de ses idoles.
Jeudi 24 Novembre 2016, 13h56
L’amour poupée
Habite le sang des lunes,
Maison des yeux miroirs
Où, tapissée de nuit,
La forme des oublis rejoint ses yeux.
Elle tremble dans les linges
Où les sanglots du miel
Ont marbré l’eau des cils.
Amour si longue et dénouée
Dans le baiser des roses,
Avec les deux étoiles, tessons d’attente,
Et la fumée de lèvres au fil à fil
Cousue de tant de jours cachés
Qui furent enfance.
Ma tendre nue de chiffon pur,
Fardée de solitude et d’incisions,
Pivoines aux ongles morts,
Vivante et seule au cœur de l’aube,
Tu regardes les gouttes à l’orient du rosier.
Jeudi 8 Décembre 2016, 22h09